HISTOIRES COURTES ET SUPERMAN PUNCH


En guise d’avertissement :
Pour ceux qui auraient un doute, ce qui vient n’est pas de l’ethnopsychiatrie ou du chamanisme, c’est une petite chose à contretemps, mélangé avec un je-ne-sais-quoi et une cuillère de soupe aux choux. A moins que ce soit du réalisme fantastique venant de l’autre côté du miroir, ou peut-être une drôle d’histoire de rôle. Dans tous les cas, on peut en faire un objet de curiosité, à moins d’avoir quelques aptitudes pour voir ces choses repliées à l’intérieur d’autres choses dépliées. Nous prions donc notre aimable lectorat de prendre un peu de distance pour éviter les réactions intempestives d’une interprétation non ordinaire. Nous recommandons également aux enfants turbulents de ne pas assister au spectacle.


LES PETITES DEVINETTES
 

Le pays des merveilles vous propose un intermède méditatif pendant l’heure du thé. Vous pouvez y réfléchir ou faire n’importe quoi d’autre qui ne porte pas atteinte à la bienséance, en tenant compte que ce n’est pas une course de vitesse, ni un test réflexe myotatique et encore moins un sujet de dissertation.

Cela ressemble à une mascarade, cela a le goût de délire mais ce n’est pas du gâteau, qu’est-ce que c’est ?

Comment faire atterrir un Boeing 777 sur un porte-avion ?

Pourquoi les spectateurs craquent-ils lorsqu’ils ne comprennent plus Rien alors qu’une Personne veut les aider et que les plus contrariés crient au Fou ?

Pourquoi vous nous le demandez lorsque l’on vous demande de résoudre cette demande sans nous demander de la résoudre à votre place surtout lorsque l’on vous explique comment la résoudre sans nous le demander ?

Il existe un endroit où Rien peut-être dévoilé, cependant pour y arriver il faut suivre Personne, alors pourquoi le Fou fait-il si peur quand Rien et surtout Personne se mettent à jouer avec lui ?

Comment définiriez-vous l’expression indexicale « connerie humaine » ? Pourquoi pourrait-on dire de la recherche scientifique qu’elle serait probablement un remède contre l’ignorance mais qu’elle serait sans effet sur la connerie ? Si la connerie est sans limite ou si elle impose une limite, que pourrait-on faire pour retrouver un sens à une vie de con sans le devenir soi-même ?

Lewis Carrol a écrit : « Soyez ce que vous voudriez avoir l'air d'être ; ou, pour parler plus simplement : Ne vous imaginez pas être différente de ce qu'il eût pu sembler à autrui que vous fussiez ou eussiez pu être en restant identique à ce que vous fûtes sans jamais paraître autre que vous n'étiez avant d'être devenue ce que vous êtes. » Il ajoute ceci : « A vrai dire, j'ai tellement changé depuis ce matin que je ne saurais plus dire qui je suis. » Il fait alors ce commentaire : « Ne soyez pas si pressé de croire tout ce qu'on vous raconte. » Et pour finir : « S’il est impossible de ne pas penser à quelque chose, il reste encore possible de penser à autre chose. » Alors que reste-t-il de mieux à faire lorsqu’on a perdu le fil en Soi ?
 


UNE HISTOIRE DE CON

Quel est le plus grand dilemme pour quelqu’un qui déclare que l’autre est un con ? C’est peut-être de ne pas savoir s’il ne l’est pas lui-même vis-à-vis d’un autre. Alors si on est susceptible d’être pris dans la connerie, de l’entretenir ou de la créer soi-même, comment faire pour s’en préserver ? Pour vous aider à aborder cette problématique dans un contexte bien délimité, parmi les infinités de définitions possibles :

Définition arbitraire de la connerie : comportement qui se distingue par l’utilisation abusive du langage sans se soucier de savoir si ce qui est déclaré est vrai ou faux. Situation où il n’y a plus de jeu de mots, de langue de bois ou de précautions oratoire à caractère diplomatique, mais un abus d’expression à l’emporte-pièce pour dire tout et son contraire, sans ménager ses efforts pour nuire à son prochain, tout en hurlant à tue-tête pour manifester par la colère une incompréhension face à un phénomène inconnu. Capacité naturelle à faire la sourde oreille et ne pas se soucier de son prochain, en imposant aux autres des idioties sans la moindre logique. La connerie se distingue de la duperie qui elle se réfère à une réalité que l’on altère volontairement pour cacher la vérité.

Définition arbitraire du con : il reste imperturbable face à la vérité, quasiment indiffèrent lorsqu’on lui montre du doigt ses erreurs et il refuse systématiquement de se remettre en question. Il se présente souvent en expert, distille des conseils et des flatteries à ceux qui l’écoutent sans le critiquer. Il aime s’entendre parler lorsqu’il croit dire des choses importantes et plus encore lorsqu’il ne communique rien de consistant et qu’il veut absolument avoir le dernier mot. Il a une propension à réduire au silence toutes pensées critiques en invoquant son autorité, des auditeurs peuvent avoir le réflexe de l’écouter pour chercher dans son bavardage quelques idées à exploiter, et par la force d’attraction de la bêtise ambiante, deviennent à leur tour ses complices.

On peut comprendre que la connerie humaine puisse devenir un sujet de recherche passionnant et que le con puisse être un sujet d'analyse et d'expérimentation. On peut l’observer de loin comme on observerait un objet de curiosité ou de plus près comme on le ferait derrière la vitre d’un zoo humain.

La capacité de nuisance du con n'est pas à sous-estimer pour ceux qui souhaitent vivre dans le calme et la bonne humeur. On peut faire des efforts pour accepter sa nature profonde puisqu'il n'est pas prêt de changer ; ou bien l'ignorer quand il devient insupportable et qu'on n'a plus de temps à perdre avec lui.
 

 


MOSQUITO

Paroles de la comptine Mosquito, à chanter aux enfants avant de dormir :

" No me moleste mosquito
No me moleste mosquito
No me moleste mosquito
Retourne chez toi
Je fais la sieste, moustique
Arrête un peu ta musique
Ne sois pas antipathique
Ne me pique pas
Moustique, mon vieux, tu vois trop petit
Tu as des ailes, va voir du pays
J'ai un patron plus large que moi
Vas-y de confiance, c'est moi qui t'envoie
No me moleste mosquito
No me moleste mosquito
No me moleste mosquito
Retourne chez toi
Tu me vois mélancolique
De te troubler ton pique-nique
Si tu me goûtes moustique
Tu n'aimeras pas
Y'a des pays pleins de voluptés
Pour un moustique de qualité
A St-Tropez, à Honolulu
Tout l'monde, il est gros, tout l'monde, il est nu
No me moleste mosquito
No me moleste mosquito
No me moleste mosquito
Retourne chez toi
Je fais la sieste moustique
Arrête un peu ta musique
Ne sois pas antipathique
Ne me pique pas "


HISTOIRE DE FOU, DE RIEN ET DE PERSONNE


Il était une fois 3 personnages étranges en mission dans l'étrange jungle des réalités non ordinaires.

Personne : individu recherché pour avoir fait de l’insurrection et réveillé les dormeurs.
Rien : Quelque chose ou quelqu’un qui voit sans être vu ou qui est vu sans se faire remarquer.
Fou : Flou Ovnien Ummo

Au cours d’une excursion dangereuse dans la jungle, Personne se prend les pieds dans une histoire de « bric à brac » et tombe dans un trou creusé par des fanatiques de la soucoupologie. Il se produit alors une fantastique conversation pour comprendre ce qu’il se passe.

RIEN : Vite, il faut appeler quelqu'un ! Avant de voir rappliquer la horde sauvage. Il ne va pas s'en sortir si on le laisse tout seul.

FOU : T’inquiète pas, je m'en occupe !



Fou appelle alors les services de secours du septième type en utilisant le téléphone magique.

FOU : Allô les secours ? Personne est tombé dans un trou et Rien me dit de vous appeler.

Les secours : Est-ce que vous êtes fou ?

FOU : Oui c’est moi ! On se connaît ?

Les secours : Si vous êtes fou vous devriez savoir que je ne peux pas vous aider sans comprendre ce qu’il se passe.

FOU : Nous avons besoin d’une opération de secours.

Les secours : Avant d’envoyer des secours, je dois évaluer votre situation sur le terrain. Je ne peux pas organiser une opération de sauvetage sans prendre en compte le contexte.

FOU : Justement c'est une urgence, il faut venir à notre secours !

Les secours : Vous devez d'abord porter les premiers soins et appliquer le protocole pour aider quelqu'un à sortir d’un trou dans le sol

FOU : C’est bien le problème, on pourrait le sortir de son trou mais Personne préfère rester sur place !

Les secours : Comment ça ? Je ne comprends pas.

FOU : Il y a Rien dans le trou avec Personne, et il n'arrive pas à le persuader d'en sortir alors qu’il peut le faire par ses propres moyens.

Les secours : Je ne comprends toujours pas.

FOU : On peut en sortir comme on veut, j'y suis allé et Rien ne peut expliquer pourquoi Personne ne veut bouger.

Les secours : Passez-moi cette personne au téléphone, je peux le raisonner et lui indiquer la marche à suivre pour le premier pas.



Il se produit un passage du téléphone magique, Fou demande à Personne s'il veut répondre au septième type, et Rien fait le relais.

Les secours : Vous êtes bien la personne ?

PERSONNE : Oui, c'est moi, que puis-je pour vous ?

Les secours : C'est plutôt à nous de vous aider pour vous en sortir, nous sommes les services de secours.

PERSONNE : Que voulez-vous faire au juste ?

Les secours : Vous aidez à sortir de votre trou.

PERSONNE : Ce n’est pas le mien, je suis tombé dedans par hasard.

Les secours : Ce n’est pas important, je vais vous indiquer la marche à suivre pour vous en sortir.

PERSONNE : Ah bon, et pourquoi ?

Les secours : Vous êtes en danger, si vous êtes dans un trou dans le sol en zone hostile, vous risquez de vous faire prendre au piège, de vous affaiblir au point que la horde sauvage vous tombe dessus.

PERSONNE : Je ne me sens pas en danger.

Les secours : Ce n’est pas vrai, dans la confusion vous ne savez plus ce que vous risquez. Avec tous les psychodrames de la jungle, vous avez oublié la plus élémentaire des précautions ! La horde sauvage en profitera pour vous attaquer en espérant se nourrir de votre carcasse.

PERSONNE : Il y a aucun risque si je reste dans mon trou. Il y a plus de risque si j’en sors.

Les secours : Qu'est-ce que vous voulez dire ?

PERSONNE : Rien me dit de m'en sortir et je ne suis pas Fou au point de prendre le risque de faire des mauvaises rencontres avec la horde sauvage.

Les secours : Mais qu'est-ce que vous me racontez là ! C'est le contraire justement, si vous restez dans le trou, vous vous mettez en danger, vous le comprenez non ?

PERSONNE : Pour moi c'est le contraire.

Les secours : C’est une histoire de fou, vous est quelqu'un de bien étrange.

PERSONNE : Non je regrette, je ne suis pas étrange mais seulement Personne et j'essaye de faire mon petit trou pour m'en sortir.

Les secours : Vous avez fait un trou pour vous en sortir ! Mais cela ne veut rien dire ! Vous devez plutôt sortir de votre trou et suivre vos compagnons de route. Ne faites pas le fou et ne faites rien que vous puissiez regretter par la suite.

PERSONNE : La suite de quoi ?

Les secours : De votre mission dans la jungle des réalités non ordinaires. J'espère que vous ne l'avez pas oublié !

PERSONNE : Ah oui c'est vrai, la fameuse mission, ça fait longtemps que je n'y avais pas pensé.

Les secours : Je ne vous sens pas très motivé, pour quelqu'un de votre stature vous devriez prendre les devants et montrer l'exemple.

PERSONNE : C'est ça le problème, je ne veux plus être devant, en première ligne. Je veux être derrière avec Rien. J'aimerais bien que ce Fou prenne le relais.

Les secours : Faisons le point voulez-vous. Je résume votre situation. Vous n'êtes pas en danger, vous êtes dans un trou, c'est intentionnel, ce n'est pas un accident, ni un piège ou une mauvaise rencontre. Tout près de vous dans le trou, il n'y a rien tandis qu'un fou vous observe d’en dehors.

PERSONNE : C'est cela oui ! Vous avez tout compris !

Les secours : Bon, alors si vous voyez rien, j’aimerais lui parler, passez le moi au téléphone.


Il se produit un passage du téléphone magique, Personne demande à Rien s'il veut répondre au septième type, et Fou fait le relais.

Les secours : Allo ici les secours, vous avez rien ?

Rien : Rien à l'écoute, qui êtes-vous ?

Les secours : Les services de secours pour les urgences et les missions de sauvetage. Avez-vous suivi la discussion que j’ai eue avec personne et l’autre fou.

Rien : J'ai tout vu mais je n'ai rien fait, je ne souhaite pas interférer, je suis en mission d'observation.

Les secours : Est-ce que vous êtes le témoin ?

Rien : Non, je ne suis Rien.

Les secours : Ce n’est pas grave, je me comprends.

Rien : Heureux de l'apprendre, j'espère que vous y arriverez à comprendre quelque chose parce que cela commence à partir en fumée. Il va vous falloir un peu de patience.

Les secours : Pour faire quoi ?

Rien : Je vais essayer de vous aider à comprendre mais vous risquez de ne pas suivre.

Les secours : Mais qu'est-ce que vous racontez là ! C'est vous qui avez besoin d'aide !

Rien : Non ce n’est pas moi, c'est Personne qui a fait une chute.

Les secours : Oui je sais, il est tombé dans un trou.

Rien : Je vois que vous connaissez l'histoire.

Les secours : Non, non et non ! Je ne souhaite pas connaître vos aventures ou vos péripéties. Je m'occupe des situations d'urgence, point à la ligne ! Avez-vous réellement besoin d'aide ou pouvez-vous vous débrouiller tout seul ?

Rien : Je ne suis pas seul, je suis avec Personne dans le trou et Fou nous regarde d'en haut.

Les secours : Oui, je sais c'est encore une histoire de fou !

Rien : Vous en savez des choses !

Les secours : Comment ça ?

Rien : C'est à cause de ce Fou que Personne ne veut bouger, il est tombé dans le trou, et je crois qu'il préfère se faire dévorer par la horde sauvage que de continuer notre mission tous les trois.

Les secours : C’est un abandon ou une démission ?

Rien : Je crois que si Personne ne fait pas ce qu'on lui dit, c'est aussi par esprit de contradiction.

Les secours : Je ne suis pas sorti de cette affaire ! Je vous laisse vous débrouiller entre vous. J’ai autre chose à faire que de m’occuper d’une histoire de fou avec rien n'y personne, cela dépasse mes compétences. Lorsque vous appelez les urgences, c'est pour que l’on organise un sauvetage, pour vous permettre de sortir d’une situation dangereuse. On ne fait pas de philosophie, ni de débats et on n'est pas là pour débrouiller des histoires extraordinaires !

RIEN : Je comprends, vous avez le droit de le dire et de le penser mais la réalité est plus complexe vous savez. C'est particulier cette drôle d’histoire où les rôles de chacun se mélangent dans une logique non ordinaire. Ici le terrain est hostile, les conventions ne s'appliquent pas comme on le voudrait. Ce que vous pensez que nous devrions faire dans l'idéal ne correspond plus à rien.

Les secours : Je ne vais jamais m'en sortir avec vous trois. Alors dites au fou de vous aider à faire sortir cette personne de son trou. Ensuite faites une concertation pour que vous soyez tous les trois sur le même niveau de matérialité. Et n’oubliez pas de poursuivre la mission !

RIEN : Il suffisait de le demander, je vais faire le nécessaire. Excusez-nous pour le dérangement, il s'agissait d'un intermède dans une drôle d'histoire de rôle.

C’est alors que Rien n’arrête cette histoire de Fou et que Personne ne reste dans son trou.

   


ZOOLOGIE DU BORDEL AMBIANT


Dans la jungle tropicale, il y fait un climat torride, ça chauffe si fort que les tribus partent en expédition dans des raids insensés pour des tentatives d'occupation de territoire. Il y a tellement de conflits que la rivalité entretient une forme de folie dans une zone devenue hostile pour tout le monde. L’objectif revendiqué par tous et la recherche de la vérité qui vient d’ailleurs, pour ce faire les différentes tribus tentent de récupérer des objets exotiques, de chasser les reptiliens qui se mettent sur leur passage, d’étudier les grands primates pour comprendre la régénération des dinosaures, de récolter des indices sur le crash de la soucoupe, de suivre les pistes laissées par la source secrète, de partir à l'aventure pour résoudre des mystères insondables, de sauver les rescapés des anciens contacts et impacts, de retrouver à toute fin utile le coffre au trésor du Kraken qui contient des documents authentiques. Toute cette pagaille se déroule sans aucun discernement malgré la preuve des préjudices et des dommages collatéraux. Depuis le jour fatidique de la rencontre de près, des observateurs en visite observent ce bordel ambiant avec consternation. Ces visiteurs de l'ailleurs ont aussi leur mot à dire, et cela risque de déplaire, car dans toute cette pagaille beaucoup ont oublié l'existence de la montagne.

Point de vue du réalisateur disparu dans la jungle :
On ne sait plus ce qu'il se passe réellement, d'autant plus que le scénariste fait la grève, que le producteur exécutif a baissé les bras et que le chef opérateur est porté disparu. Les coproducteurs ne sont plus d'accord entre eux, les délégués et les mandataires sont motivés par des enjeux et des visions en contradictions les unes aux autres. Dans le grand bazar intersidéral et intemporel, les créatures de l'espace continuent de danser, les agents de liaison et les marionnettes ont perdu le fil, les spectateurs ne savent plus ce qu'il faut comprendre ou se doutent qu'il y a trop d'émotions . J'ai beaucoup de mal dans la mise en scène d'une réalité empilée dans une contorsion majestueuse sens dessus dessous et qui se transforme en mille-feuille sans bords ni frontière.
Les pistes tortueuses nous montrent des combats et des chocs violents, les conséquences des évènements sont incalculables dans une jungle sans foi ni loi : piétinement, retour sur place, accrochage, collision, contournement, voltige, twist, spin off, reboot, soft reboot, remake, prequel, sequel, sidequel, retcon, cameo, cross over, réadaptation, détournement, mashup, orchestration, polyphonie, chorégraphie, improvisation, confusion, brouillage, destruction, désolation, effondrement, combustion, déconstruction.
On m’a chargé de réaliser le film mais je ne sais pas comment le finir. C’est pour cela que je retourne dans la jungle pour m’imprégner de tous ces événements bouleversants et observer une réalité non ordinaire en train de se faire.

Point de vue du cadreur :
Y a-t-il un pilote pour diriger ce film ? Qu’est-ce que c’est que ce scénario à la con ! Est-ce que le scénariste existe encore ? Tout le monde sait que plus personne ne se parle dans le bordel qu'est devenu la réalisation de ce film. Il ne reste plus que des mauvaises raisons de se disputer dans le catalogue des mauvais choix.
Le menu du restaurant de la société de production n'a plus de fin, tout s'enchaîne dans l'incompréhension, impossible de passer une commande, il ne reste que le self-service qui fonctionne encore. Le menu est peu ragoûtant, par ici la soupe aux choux est froide, là-bas le plat de résistance trop brûlant et il y a trop de plats Klingon disséminés un peu partout.
Il y a bien quelqu'un qui doit savoir quelque chose sur le réalisateur et le chef opérateur ! Où sont-ils passés ? A croire qu’ils ont été dévorés par une créature, il n’y a plus personne en charge de quoi que ce soit. Qui pourrait reprendre la réalisation du film pour le terminer avant le naufrage ? La rumeur prétend que le réalisateur s'est planqué au cœur des ténèbres pour lire des poèmes à haute voix dans le théâtre ambulant et sous les bombardements aériens.

Point de vue du machiniste :
Je passe mon temps à remettre en état les portes défoncées et arrachées, à réparer les marionnettes fracassées et les fils sectionnés. Je ne comprends rien aux jeux de rôle et encore moi les théories sur les acteurs. Tous les intervenants gaspillent beaucoup trop de munitions à tirer dans tous les coins dès qu'il y a un peu d'action. Les cascadeurs ne m'écoutent plus depuis le jour de la marmotte, ils veulent tous devenir comédien et faire un cameo. Le réalisateur m'a dit d'improviser et m'a donné une carte joker, je ne sais pas ce que cela veut dire. Je suis débordé et je n'ai plus de temps pour faire correctement les choses. Le planning n'est pas respecté, on est tout le temps en dépassement et le budget a explosé. On tire des feux d'artifice tous les jours, les pyrotechniciens sont en burn out. Le producteur exécutif ne répond plus au téléphone. Il y a trop de fumée sur le plateau et pas assez d'extincteurs pour limiter les petits incendies.

Point de vue du producteur exécutif :
Je crois fermement que pour se donner les moyens de faire un bon film, il faut laisser du temps au réalisateur pour concrétiser sa vision. Nous avons beaucoup travaillé en pré production pour faire aboutir le projet. Le réalisateur doute encore de pouvoir terminer le film mais j'ai toute confiance en lui. Nous avons obtenu des résultats impressionnants pendant les prises de vue et le tournage. Cela dépasse nos espérances, nous allons faire un travail magnifique en post-production.

Point du vue du scénariste en grève :
On se calme tous et on revient sur Terre, je ne vais pas passer ma vie sur la Lune à observer au-delà de l'infini. Dans la jungle, les tribus en guerre préfèrent inventer de nouveaux mots pour revivre les mêmes histoires au lieu de vivre de nouvelles histoires sans inventer de mots nouveaux. La grève du scénariste continue et le spectacle spectaculaire.

Point de vue du spectateur après la projection test :
Je suis complètement perdu, je ne comprends plus rien. J'ai l'impression d'être moi aussi un personnage de cette histoire interactive, cela me parle et cela me dépasse également. Je pense qu'il y a quelque chose à comprendre mais je ne peux pas l'exprimer avec des mots. Il me faut du temps pour digérer tout ça. Je crois que ce qu'il se passe dépasse les catégories comme si nous étions dans un tout petit fragment de la réalité, et que nous percevions par une porte entrouverte quelque chose d'inimaginable. Dans tous les cas, il y a de quoi faire dérailler le cerveau et tromper tous nos sens.

Point de vue du monteur en post-production :
On a envoyé un journaliste d'investigation sur les traces du réalisateur mais il a lui aussi disparu le jour de la marmotte. Il était en compagnie d'un éléphant qui lui par contre se porte bien. L'éléphant continue de discuter avec les créatures fantasques en orbite géosynchrone tandis que le Kraken fait encore parler de lui. Si quelqu'un y comprend quelque chose, qu'il m'envoie un message pour m'indiquer la sortie de secours la plus proche ! Je ne vais pas passer ma vie dans le monde de Brak no 3, à reconstituer l'intérieur de l'abîme, les psychodrames des zones hostiles et des opérations de sauvetage ! Si la réalité est trop délirante à raconter, c'est peut-être parce qu'il n'y a plus assez de mots dans le scénario et qu’il est tant de se remettre en question. Si vous ne me croyez pas, vous n'allez qu'à voir les rediffusions des boucles temporelles.