Le poète (Mel Vadeker, 1997)

Le poète a vécu miraculeusement sa mort lyrique dans le texte nébuleux qui coule de son oreille. J'espère qu'un jour un humanoïde de la planète reconnaîtra l'effort et priera sur ma tombe. J’espère qu'un jour la conscience de Tout Ce Qui Existe pourra me lire après ma mort, au moment où j'occuperai mon âme à d'autres oeuvres héroïques. Je suis celui qui malaxe la chair vivante porteuse d'une liaison cosmique dans le cerveau pour la gloire de la poésie éternelle. Je suis celui que le destin accable d’une mission dangereuse. Je suis le voyant qui parle à la place des aveugles du monde et à l’intention des créatures humaines dégénérées, destructrices de vie et suicidaires. Mon univers de travail est un caveau plein de virage vers la folie créatrice. Je vis dans la guerre lucide qui remettra mon mental en place. C'est avec une voix triste et éraillée comme le premier réveil lucide dans l'antre du diable que je salue l'horizon de mes prochaines rencontres avec l'inconnu. Ici à cet endroit je suis ton invité grande ombre amicale et pénétrante. Je quitte la lumière pour les ténèbres, pour un repos mérité. J’ai besoin de ce repos du guerrier, ce calme proche du repos éternel.

J'ai mangé mes livres scolaires qui ne m'ont pas quitté depuis ma dernière vie sur cette planète. Je pleure en traduisant les textes d'une langue saignante vers une autre encore plus dangereuse. Même le ciel pleure avec moi son bonheur de vivre une joie tranquille qui fracasse les chaires. En entrant dans mon lit j'ai trouvé mon corps en morceaux, c'est un signe de l'univers. J'ai vécu trop longtemps en dehors de mon corps, il me faudra me réincarner dans un autre temps pour finir cette histoire.

Je frappe de toutes mes belles cicatrices, de mes doigts secs et endormis, les lignes que tu lis en ce moment. Dans le présent intemporel, je frappe ces lignes sur une machine à écrire organique et toi tu t'abreuves du fruit de mon labeur pour vivre ce qui se cache derrière mes doigts. Lis donc sans peur ni remords car le jour où tu verras sous mes doigts je ne serais plus de ce monde pour te le reprocher. Lis donc, car c'est le moment de communion dans le présent hors temps. En lisant ceci tu m'insuffles un peu de ta vie, je t'en remercie, tu m'as redonné un peu de la vitalité qui passe par tes sens. Ne me cherche pas j'ai déjà traversé ton esprit et j'ai atterris derrière ton oreille. Il faudra que tu fasses comme moi pour me faire sortir du caveau. Revient sur tes pas et retrace le parcours de la poésie, je revis par ta faute un moment merveilleux. Je te salue, je te reverrai à l'intérieur quand tu en auras finit avec ce texte.