SÉPULTURE (Mel Vadeker, 1997)
       
      J'ai visité ce cimetière
      pour retrouver les restes
      de mon ancienne chair.
       
      Je suis arrivé en planant
      sur une illusion
      un nuage aussi dense que mon inquiétude.
       
      Voici donc le temps de l'avenir
      je perçois de nouveau
      sans mourir de cette peur
      celle qui contracte ma connaissance.
       
      Dans cette antre macabre
      je contourne un espace vide
      le fossoyeur et son oeuvre
      mes restes sont mélangés.
      O crâne, O ossuaire !
      Ce silence, est-ce ma réponse ?
       
      Je ne peux descendre de nouveau
      à l'intérieure de trou
      ce lieu maintenant maudit.
      Pourquoi prendre ce pari insensé,
      et me voir de nouveau perdu
      à l'intérieur de ce somptueux caveau ?
       
      Ici je te regarde,
      O fossile, O ossuaire !
      je suis l'invité de marque
      et toi tu m'accueilles
      en avalant ta langue.
       
      Être ou ne pas être,
      telle est la question posée
      au temps ancien
      où sur le lit de mort
      tu as vu ma prochaine vie.
       
      Je te réponds avec une joie mêlée de crainte
      les deux vont de paire !
      Un miroir sans fin
      les faces s'opposent et s'annulent.
       
      Tu as été et je ne l'étais plus
      tu restes dans le lieu hors temps
      ma présence te trompe
      j'existe mais ne le suis plus pour toi.
       
      Sur le linge de ton corps blanc
      je me plie et te salue bien bas
      je prends un bouquet de fleurs prophétiques
      pour embaumer tes ossements.
       
      J'ai peur de défaillir sur l'instant
      de faire le geste
      de relier mes reliques
      de sombrer dans cette fosse.
      Un lieu puissant
      le témoignage matériel
      d'un pourvoir terrestre sur ma chair
      cette ancienne machine flétrie.
       
      Je suis un homme creux
      la tête pleine de messages
      pour la mémoire du futur
      pour le futur du passé
      pour le présent ancien.
       
      J'entends l'éclair
      une étincelle magique
      entre deux moments de gloire
      les travaux forcés et la lutte armée.
       
      Mes armes restent dangereuses,
      alors je te prie d'être mon allié.
       
      O vie puissante !
      Ne me tue pas tout de suite
      je ne tiens plus à faire de vieux os.
       
      J'ai mangé la substance mort
      la prescience infaillible
      la vision sur ma destinée trouble.
       
      Une drogue faite d'ossements
      pulvérises, broyés et malaxés
      dans l'eau pure d'une source du désert
      boire cette roche pour redevenir poussière.
       
      Nuages de cendres
      souffle strident
      vibrant entre mes oreilles.
       
      Ces humains que je fuis
      ont ils prêté attention
      aux gémissements de mon âme
      quand je luttais en enfer ?
       

    • Corpus occasionnels de poésies et de proses