Ci dessous, propos sur la rétention des données de
connexion sur Internet et son influence sur la vie privée, par Richard
Stallman.
Stallman : La vie privée vient tout bonnement d'être abolie
28 juin 2002"La vie privée est tout bonnement abolie lorsque les gouvernements surveillent ceux à qui vous parler, où vous allez et ce que vous lisez"
Propos bruts d'un honnête homme.
Richard Stallman, créateur du mouvement des logiciels libres, ne trouve aucun avantage à la rétention des données de connexion.
Les ONG de défense des libertés publiques du monde entier ont beau partager ses préoccupations, le Parlement Européen a néanmoins voté la rétention des données de connexion fin mai 2002.
En donnant tout pouvoir aux parlements européens d'adopter, ou de renforcer, leurs propres lois en matière de rétention des données de connexion, plus de 16 000 citoyens, mais aussi des dizaines d'ONG internationales, relayées par le site de défense des droits de l'homme allemand stop1984.com, ont purement et simplement été ignorés.
Il importe désormais aux parlements nationaux de décider si, oui ou non, il introduiront, ou renforceront, leurs lois en matière de rétention des données de connexion. Stop1984.com a donc décidé de faire front, s'adressant à tout un chacun, qu'il réside en Europe ou non.
"Cette mesure ne concerne pas que les seuls Européens", explique l'un de ses portes-parole. "Elle vise quasiment tout le monde. Le gouvernement américain a perçu la rétention des données de connexion comme un moyen de lutter contre le terrorisme, et il semble que, dans le monde entier, nombre de gouvernements ont été attirés par ce genre de collecte et de conservation des données de connexion. Il ne tient qu'à nous de leur expliquer que nous ne mordons pas à cet hameçon à mesure qu'elle ne sera pas efficace en matière de lutte contre le terrorisme."
Il ne s'agit pas d'une question de "protection de la vie privée", mais de "droits de l'homme", ce que Stallman, visiblement en colère, définit comme "des mesures qui serviront à supprimer les dissidents politiques. Les forces de l'ordre se serviront de la rétention des données de connexion comme les nazis le firent : afin de mettre le grappin sur les 'proches' des contestataires en vue de mettre la main sur d'autres dissidents, et de les interner."
Ses préoccupations sont partagées par nombre d'individus de par le monde. Phil Zimmermann (le créateur de PGP, le plus populaire et usité des outils de cryptographie au service des droits de l'homme -NDT) et Wolf-Dieter Roth, un journaliste allemand, entre autres. La réponse de Roth en matière de "lutte contre le terrorisme via la rétention des données de connexion" est simple : "les gens apprendront à faire avec ce genre de nouvelles mesures s'ils y sont obligés. Au lieu de parvenir à trouver les terroristes, la police ne trouvera que des innocents pris par accident dans les mailles de cette cybersurveillance. Son efficacité est plus que discutable", avance Roth, comparant les autorités avec des "messies" qui, un jour ou l'autre, seront perdus face à l'ampleur des données collectées. "La possibilité de trouver quelque donnée pertinente que ce soit en matière de lutte contre la criminalité ne peut autoriser un gouvernement à tout intercepter."
Roth et Stallman ne sont pas convaincus par les arguments relatifs à la lutte contre la criminalité, et plus particulièrement à ceux qui font référence aux évènements du 11 septembre. A mesure que la NSA (National Security Agency, service secret chargé d'enregistrer toutes les télécommunications - NDT) n'a pas été en mesure d'empêcher quoi que ce soit, les points de vue de Stallman et Roth semblent on ne peut plus logiques.
"Si les données actuellement conservées ne peuvent empêcher des attaques terroristes de se produire, comment la conservation d'un plus grand nombre de données pourrait-elle le faire ?", selon Roth. "Nous n'aurons plus de vie privée, et il sera possible d'établir un portrait-robot de ceux à qui nous écrivons, à quelle fréquence, et de ceux qui nous écrivent ou à qui nous écrivons, etc." Plus incisif encore, Stallman avance que "la vie privée est tout bonnement abolie lorsque les gouvernements surveillent ceux à qui vous parler, où vous allez et ce que vous lisez".
Interrogé sur ce qu'il faudrait faire en matière de rétention des données de connexion, Stallman répond simplement que "les politiciens devraient reconnaître que les mouvements sociaux contre la globalisation libérale n'ont de raison d'être que parce que les gouvernements travaillent pour le secteur privé, pas pour les gens. Les hommes politiques devraient travailler à réduire le pouvoir des sociétés privées, de sorte que les gens n'aient pas à choisir enter la protestation et l'apathie."
Philipp Zimmermann, Wolf-Dieter Roth et Richard Stallman ne sont que quelques-unes des personnes à s'être senties concernées par cette campagne internationale lancée par stop1984.com. Il ne tient qu'aux citoyens, désormais, de décider s'ils tiennent à leurs vies privées ou non. Si la réponse est "oui", vous pouvez signer là :
http://www.stop1984.com/index2.php ?lang=fr&text=letter.txtVersion originale disponible sur
http://www.stop1984.com/index2.php ?lang=en&text=letter_stallman.txt.