Contexte de l’accident de Tchernobyl
L’accident de la centrale nucléaire de Tchernobyl, survenu le 26 avril 1986 en Ukraine, est la catastrophe nucléaire la plus grave de l’histoire, classée au niveau 7 sur l’échelle internationale des événements nucléaires (INES). Il résulte d’un test de sécurité mal conçu sur le réacteur n°4 de type RBMK-1000, aggravé par des défauts de conception du réacteur et des erreurs humaines. L’explosion initiale a libéré un nuage radioactif qui a contaminé une grande partie de l’Europe, mais une menace moins visible s’est formée dans les entrailles de la centrale : le corium, un matériau hautement radioactif issu de la fusion du cœur du réacteur.
Le RBMK-1000 est un réacteur soviétique à eau bouillante modéré au graphite. Ses défauts incluaient un coefficient de vide positif (augmentation de la réactivité en cas de formation de vapeur) et des barres de contrôle inadéquates, qui ont contribué à l’emballement du réacteur lors du test fatal (The Chernobyl Accident: Updating of INSAG-1, AIEA).
Lors de l’accident, la température dans le cœur du réacteur a dépassé 2 000 °C, provoquant la fusion du combustible nucléaire (dioxyde d’uranium, UO₂), des gaines de zirconium, des barres de contrôle et des matériaux environnants (acier, graphite). Ce mélange en fusion, appelé corium, est un matériau complexe composé d’oxydes d’uranium, de zirconium, de silicates et de produits de fission radioactifs comme le césium-137 et le strontium-90. Environ 100 à 200 tonnes de corium ont été produites, dont une partie s’est écoulée dans les sous-sols de la centrale, perçant partiellement la cuve du réacteur et les structures en béton sur une profondeur d’environ 1 à 2 mètres (Journal of Nuclear Materials, Burakov et al.).
Le corium n’est pas un "magma" au sens volcanique, mais un mélange unique formé dans des conditions extrêmes. Sa composition varie selon les matériaux rencontrés :
Combustible nucléaire : Dioxyde d’uranium (UO₂).
Matériaux du réacteur : Zirconium (des gaines), acier, graphite.
Matériaux environnants : Silicates issus du béton et du sable.
Isotopes radioactifs : Césium-137, strontium-90, responsables de la radioactivité intense.
Le corium génère une chaleur résiduelle en raison de la désintégration des isotopes radioactifs, ce qui le rend corrosif et capable de dégrader les structures en béton.
La Patte d’Éléphant : un vestige radioactif
L’accident de la centrale nucléaire de Tchernobyl, survenu le 26 avril 1986 en Ukraine, a produit une masse de corium, un mélange fondu de combustible nucléaire (dioxyde d’uranium, UO₂), de zirconium, de graphite et de matériaux environnants (béton, sable). Une partie de ce corium s’est écoulée dans les sous-sols du réacteur n°4, où une formation emblématique, surnommée la Patte d’Éléphant, a été découverte en décembre 1986.
La Patte d’Éléphant, nommée ainsi en raison de sa surface plissée évoquant la peau d’un pachyderme, est une masse solidifiée de corium. Ses caractéristiques incluent :
Taille et poids : Environ 1,5 à 2 mètres de large et un poids estimé entre 5 et 15 tonnes, selon les observations à distance (Journal of Nuclear Materials, Burakov et al.).
Radioactivité : À sa découverte en 1986, elle émettait une dose de rayonnement de 80 à 100 sieverts par heure (Sv/h), mortelle en quelques secondes. En 1996, cette dose avait diminué à environ 10–20 Sv/h en raison de la décroissance des isotopes à courte demi-vie, mais elle restait extrêmement dangereuse (Health Physics, Medvedev).
Composition : La Patte d’Éléphant est composée de silicates (formés par l’interaction du corium avec le sable et le béton), d’oxydes d’uranium, de zirconium, et d’isotopes radioactifs comme le césium-137 (demi-vie de 30 ans), le strontium-90 (demi-vie de 28 ans), et des traces de plutonium-239 (demi-vie de 24 000 ans). Ce mélange forme un matériau artificiel unique appelé tchernobylite, qui n’est pas un minéral naturel mais un produit synthétique des conditions extrêmes de l’accident (Materials Research Society Symposium Proceedings, Anderson et al.).
Le sievert (Sv) mesure l’effet des radiations ionisantes sur le corps humain. Une dose aiguë de 5 Sv, absorbée en une seule exposition, est généralement mortelle sans traitement médical, causant le syndrome d’irradiation aiguë (dommages aux organes, système immunitaire, etc.). À 80–100 Sv/h, comme en 1986, une exposition de 3 à 4 secondes suffit pour provoquer des lésions irréversibles. Les doses inférieures (2–4 Sv) peuvent également être fatales sans soins, tandis qu’une intervention médicale rapide peut améliorer les chances de survie pour des doses modérées (Health Physics, Medvedev).
L’étude de la Patte d’Éléphant a nécessité des méthodes à distance en raison de sa radioactivité extrême. Les principales techniques utilisées incluent :
Télérobotique : Des robots ont été déployés pour observer et prélever des échantillons, mais beaucoup ont été endommagés par les radiations intenses, limitant les opérations à quelques minutes.
Forage à distance : Des échantillons ont été collectés à l’aide de foreuses ou, dans certains cas, de tirs à distance avec des armes à feu pour détacher des fragments (Chernobyl Notebook, Medvedev).
Caméras blindées : Les photographies, comme celle prise par Artur Korneyev en 1996, étaient réalisées avec des équipements protégés, bien que les radiations provoquaient des artefacts (grain, points) sur les images.
Ces analyses ont permis de confirmer la composition complexe de la tchernobylite et d’évaluer la stabilité du corium, essentielle pour planifier le confinement à long terme.
Aspect
Détails
Découverte
Décembre 1986, sous le réacteur n°4
Taille
1,5–2 m de large
Poids
5–15 tonnes (estimation)
Radioactivité (1986)
80–100 Sv/h (mortelle en 3–4 s)
Radioactivité (1996)
10–20 Sv/h (toujours dangereuse)
Composition
Silicates, oxydes d’uranium, zirconium, césium-137, strontium-90, plutonium-239
Matériau
Tchernobylite (artificiel, non minéral naturel)
Méthodes d’analyse
Télérobotique, forage à distance, caméras blindées
Le Syndrome Chinois : mythe et réalité
Le syndrome chinois est une métaphore popularisée dans les années 1970, décrivant un scénario hypothétique où un cœur de réacteur en fusion traverse les fondations de la centrale et s’enfonce dans le sol, théoriquement jusqu’à la croûte terrestre ou au-delà (selon le mythe, jusqu’à "ressortir en Chine"). Ce scénario est physiquement impossible, car le corium perd rapidement sa chaleur par conduction et convection dans les matériaux environnants (béton, sable), ce qui entraîne sa solidification après avoir pénétré seulement 1 à 2 mètres dans les structures à Tchernobyl (Journal of Nuclear Materials, Burakov et al.). Les barrières physiques, comme les dalles de béton renforcées (environ 1,2 m d’épaisseur), ont également stoppé sa progression (Nuclear Safety, Petrangeli).
Le risque réel à Tchernobyl
Bien que le syndrome chinois au sens littéral soit un mythe, un danger concret existait à Tchernobyl dans les jours suivant l’accident : le contact entre le corium en fusion (à plus de 2 000 °C) et l’eau accumulée dans les sous-sols du réacteur. Ce contact aurait pu provoquer une explosion de vapeur, entraînant :
Contamination des eaux souterraines : Les isotopes radioactifs du corium, comme le césium-137 (demi-vie de 30 ans) et le strontium-90 (demi-vie de 28 ans), auraient pu contaminer le fleuve Dniepr, affectant l’approvisionnement en eau de Kiev.
Dispersion locale de radioactivité : Une explosion aurait libéré des particules radioactives dans l’environnement immédiat, amplifiant la contamination locale, bien que moins massivement que l’explosion initiale de 1986 (Chernobyl: The Legacy, AIEA).
Ce risque était particulièrement critique dans les premiers jours et semaines après l’accident, avant que le corium ne commence à se solidifier.
Mesures d’urgence
Pour prévenir une explosion de vapeur, des mineurs ont creusé un tunnel sous le réacteur n°4 dans des conditions extrêmes, exposés à des doses élevées de radiations. Leur mission avait deux objectifs :
Drainer l’eau accumulée : Des pompes ont été installées pour évacuer l’eau des sous-sols, éliminant le risque de contact avec le corium.
Installer une chambre de refroidissement : Une structure en béton remplie de liquide de refroidissement a été construite, bien que non utilisée à pleine capacité, car le corium s’est solidifié avant d’atteindre les niveaux inférieurs (Chernobyl Notebook, Medvedev).
Ces efforts, réalisés sous une pression immense, ont été cruciaux pour éviter une catastrophe secondaire.
Interaction corium-béton
Lorsque le corium entre en contact avec le béton (composé de silice, SiO₂, d’oxydes de calcium, CaO, et d’aluminates), il provoque une décomposition thermique, libérant des gaz tels que :
Monoxyde de carbone (CO) : Asphyxiant, produit par la décomposition des carbonates du béton.
Hydrogène (H₂) : Inflammable, généré par l’oxydation du zirconium en présence de vapeur ou d’eau.
Dioxyde de carbone (CO₂) : Non toxique à faible concentration, mais contribuant à l’érosion des structures (Nuclear Engineering and Design, Sehgal).
Ces gaz ont accéléré la dégradation du béton, mais la solidification du corium a limité la profondeur de pénétration à environ 1–2 mètres.
Tableau récapitulatif : risques et mesures à Tchernobyl
Aspect
Détails
Mythe du syndrome chinois
Cœur en fusion traversant la croûte terrestre (impossible en raison de la dissipation thermique)
Risque réel
Explosion de vapeur due au contact corium-eau, contaminant les eaux souterraines
Période critique
Jours/semaines après l’accident (avril–mai 1986)
Mesures d’urgence
Creusement d’un tunnel, drainage de l’eau, installation d’une chambre de refroidissement
Gaz produits
CO (asphyxiant), H₂ (inflammable), CO₂ (érosion)
Profondeur de pénétration
1–2 m dans le béton, stoppé par solidification et barrières physiques
Confinement de Tchernobyl : du Sarcophage Initial au New Safe Confinement
Le Sarcophage Initial (1986)
Entre mai et octobre 1986, environ 600 000 à 800 000 "liquidateurs" (soldats, pompiers, ouvriers) ont construit un sarcophage d’urgence autour du réacteur n°4, dans des conditions extrêmes marquées par une exposition élevée aux radiations. Cette structure, appelée "l’Abri", était composée de béton et d’acier, pesant environ 30 000 tonnes. Conçue pour durer 20 à 30 ans, elle souffrait de graves défauts :
Fissures et fuites : Environ 100 m² de brèches laissaient échapper des poussières radioactives, contaminant l’environnement.
Corrosion : L’environnement radioactif accélérait la dégradation des matériaux.
Risque d’effondrement : La construction hâtive rendait la structure instable (Nuclear Technology, Holtec International).
Le sarcophage a réussi à limiter la dispersion initiale des isotopes radioactifs, comme le césium-137 et le strontium-90, mais sa dégradation a nécessité une solution plus durable.
Le New Safe Confinement (2016)
En novembre 2016, le New Safe Confinement (NSC), une arche métallique massive, a été installée par-dessus le sarcophage initial pour assurer un confinement à long terme. Financé par plus de 40 pays via le Fonds de l’Abri de Tchernobyl (géré par la BERD) pour un coût d’environ 1,5 milliard d’euros, le NSC est une prouesse technique :
Dimensions : 257 m de portée, 162 m de longueur, 108 m de hauteur, poids de 36 000 tonnes.
Durée de vie : Conçu pour durer 100 ans.
Innovations :
Double peau anti-corrosion : Protège contre la dégradation.
Systèmes de ventilation : Filtrent l’air pour réduire les émissions radioactives.
Ponts roulants télécommandés : Permettent un futur démantèlement du réacteur et du corium.
Capteurs de surveillance : Mesurent la radioactivité et la stabilité structurelle (Nuclear Technology, Holtec International).
Le NSC ne remplace pas le sarcophage, mais l’enferme, offrant un environnement sécurisé pour le démantèlement prévu du réacteur et du corium (comme la Patte d’Éléphant) sur plusieurs décennies.
Comparaison des structures de confinement
Aspect
Sarcophage (1986)
New Safe Confinement (2016)
Structure
Béton et acier, ~30 000 tonnes
Arche d’acier, 36 000 tonnes
Durée de vie
20–30 ans
100 ans
Fonction
Confinement d’urgence
Confinement et démantèlement futur
Problèmes
Fissures, fuites (~100 m²), corrosion
Aucun (conception robuste)
Innovations
Aucune (construction hâtive)
Ventilation, décontamination, ponts roulants, surveillance
Symbolisme
Tombeau scellant une catastrophe
Laboratoire pour gérer l’héritage radioactif
Le rôle du confinement
Le confinement vise à isoler le corium, y compris la Patte d’Éléphant, une masse de 5 à 15 tonnes émettant initialement 80 à 100 sieverts par heure (Sv/h) en 1986, et encore 10 à 20 Sv/h en 1996 (Health Physics, Medvedev). Ces structures empêchent la dispersion d’isotopes radioactifs dangereux, comme le césium-137 (demi-vie de 30 ans) et le strontium-90 (demi-vie de 28 ans), protégeant ainsi l’environnement et les populations.
Tchernobyl a révélé les défis de la gestion des déchets radioactifs et les limites des conceptions de réacteurs comme le RBMK-1000. Les leçons tirées incluent :
Redondance des systèmes de sécurité : Les réacteurs modernes intègrent plusieurs couches de protection.
Formation des opérateurs : Une meilleure formation réduit les erreurs humaines.
Transparence : La gestion des crises nécessite une communication ouverte.
Coopération internationale : Le NSC, financé par plus de 40 pays, illustre l’importance de la collaboration mondiale (The Chernobyl Accident: Updating of INSAG-1, AIEA).
Le NSC transforme la gestion de Tchernobyl d’un confinement d’urgence en une stratégie à long terme. Il permet non seulement d’isoler les débris radioactifs, mais aussi de planifier leur démantèlement, réduisant les risques pour les générations futures. Cette structure incarne les progrès technologiques et la coopération internationale face aux catastrophes nucléaires.
La Photographie du Pied d’Éléphant
L’accident de la centrale nucléaire de Tchernobyl, survenu le 26 avril 1986 en Ukraine, est la pire catastrophe nucléaire de l’histoire (niveau 7 sur l’échelle INES). L’explosion du réacteur n°4 a libéré un nuage radioactif et produit une masse de corium, un mélange fondu de combustible nucléaire (dioxyde d’uranium), de zirconium, de graphite et de béton. Une partie de ce corium s’est solidifiée dans les sous-sols de la centrale, formant le Pied d’Éléphant, une structure d’environ 2 mètres de diamètre et 10 tonnes, découverte en décembre 1986. À l’époque, cette masse émettait une dose de rayonnement de 80 à 100 sieverts par heure (Sv/h), mortelle en quelques secondes (Health Physics, Medvedev).
Le sievert est l’unité utilisée pour mesurer l’effet des radiations ionisantes sur le corps humain. Une dose de 5 Sv est généralement mortelle, tandis que 80–100 Sv/h, comme émis par le Pied d’Éléphant en 1986, cause des dommages irréversibles en 3 à 4 secondes. Les radiations proviennent principalement d’isotopes comme le césium-137 (demi-vie de 30 ans) et le strontium-90 (demi-vie de 28 ans).
La photographie de 1996
En 1996, une photographie emblématique a été prise dans les sous-sols du réacteur n°4, montrant Artur Korneyev, un ingénieur en radioprotection, près du Pied d’Éléphant. Souvent appelée à tort le "selfie le plus dangereux", cette image n’est pas un selfie moderne, mais a probablement été réalisée à l’aide d’un retardateur ou d’un opérateur à distance, afin de minimiser l’exposition aux radiations (Chernobyl Notebook, Medvedev).
L’aspect granuleux de la photo est dû à plusieurs facteurs :
Radiations ionisantes : Les rayons gamma émis par le Pied d’Éléphant pouvaient interférer avec la pellicule photographique, provoquant des artefacts comme des points ou un grain prononcé.
Conditions techniques : Les photographies étaient prises dans un environnement sombre avec des équipements souvent rudimentaires ou endommagés par les radiations, contribuant à la mauvaise qualité de l’image (Journal of Nuclear Materials, Burakov et al.).
En 1996, dix ans après l’accident, le Pied d’Éléphant restait extrêmement dangereux, bien que sa radioactivité ait légèrement diminué (estimée à environ 10–20 Sv/h). Les photographies étaient réalisées avec des précautions strictes, utilisant des caméras blindées ou des robots pour limiter l’exposition. Korneyev, positionné à une distance sécurisée, posait pour documenter le site dans le cadre d’inspections internationales visant à évaluer la stabilité du corium et du sarcophage.
Artur Korneyev : un acteur clé de Tchernobyl
Artur Korneyev, un ingénieur kazakh spécialisé en radioprotection, a travaillé sur le site de Tchernobyl dès les premiers mois suivant l’accident. Sa mission consistait à localiser les dépôts de corium, mesurer les niveaux de radiation, et collecter des échantillons pour analyse. Il a effectué de multiples visites dans des zones hautement radioactives, s’exposant à des doses cumulées significatives, probablement plusieurs sieverts sur plusieurs années (Health Physics, Medvedev).
Bien que Korneyev ait survécu à ses missions, une exposition prolongée aux radiations peut entraîner des effets à long terme, comme des cancers ou des maladies cardiovasculaires. Les liquidateurs de Tchernobyl, exposés à des doses élevées en 1986, ont souvent souffert de syndromes d’irradiation aiguë ou de maladies chroniques (Chernobyl: The Legacy, AIEA).
Importance de la photographie
Cette image, partagée dans le cadre de collaborations internationales pour la gestion du site de Tchernobyl, illustre les défis extrêmes de l’étude des zones radioactives. Elle témoigne du courage des liquidateurs et des ingénieurs comme Korneyev, qui ont travaillé dans des conditions dangereuses pour sécuriser le site et prévenir de nouvelles catastrophes. Le Centre de Tchernobyl pour la sûreté nucléaire, créé dans les années 1990, a utilisé de telles données pour coordonner les efforts de confinement, aboutissant à la construction du New Safe Confinement (NSC) en 2016 (Nuclear Technology, Holtec International).
Tchernobyl : un drame toujours vivant et l’urgence d’une sécurité nucléaire sans faille
L’accident de Tchernobyl, reste la pire catastrophe nucléaire de l’histoire, un événement de niveau 7 sur l’échelle INES qui a marqué le monde à jamais. Le bilan humain initial fut effroyable : 30 pompiers et travailleurs tués par des doses massives de radiations, des milliers d’enfants touchés par des cancers de la thyroïde à cause du lait contaminé, et des centaines de milliers de « liquidateurs » exposés pour contenir le désastre. Pourtant, en 2025, près de 40 ans plus tard, Tchernobyl continue de hanter. Les sols, rivières et forêts empoisonnés par le césium-137, un isotope à la demi-vie de 30 ans, rendent des régions entières inhabitables, privant les agriculteurs de leurs terres. Plus de 330 000 personnes évacuées vivent encore avec les blessures du déracinement, la peur et les préjugés. Les retombées radioactives ont atteint l’Europe, l’Asie et même l’Amérique du Nord, avec des pertes économiques estimées à des centaines de milliards de dollars. L’ampleur de ces conséquences – humaines, écologiques, économiques – est si vaste qu’elle échappe à une description complète, nous rappelant cruellement les dangers du nucléaire.
Tchernobyl a mis en lumière des failles béantes : réacteurs mal conçus, opérateurs mal formés, gestion chaotique de la crise. Ce choc a poussé le monde à réagir, avec des règles de sécurité plus strictes et une coopération internationale renforcée. Mais des accidents comme Fukushima en 2011 montrent que le risque n’a pas disparu. Les vieilles centrales, souvent construites il y a des décennies, exigent une vigilance de tous les instants. La sécurité des populations, à l’échelle mondiale, en dépend. Les progrès – comme les systèmes de refroidissement sans électricité ou les réacteurs plus robustes – doivent être incessants et sans compromis. Pourtant, leur adoption traîne, et les technologies de demain, encore en gestation, tardent à arriver. Pour protéger les générations actuelles et futures, l’industrie nucléaire et les décideurs doivent s’engager pleinement à tirer les leçons de Tchernobyl, en surveillant sans relâche les centrales vieillissantes et en bâtissant un avenir énergétique plus sûr.
Le monument "à ceux qui ont sauvé le monde" est situé dans la zone d'exclusion à Tchernobyl, dédié aux pompiers qui sont morts en éteignant l'incendie de la centrale nucléaire de Tchernobyl en 1986, après l'accident nucléaire catastrophique qui s'y est produit. Le monument est également dédié aux liquidateurs de Tchernobyl qui ont nettoyé les lieux après l'accident.
La patte d'éléphant (Mel Vadeker)
Sous la voûte d'acier où l'atome fut roi,
Repose la bête née d'un funeste flambeau,
Le monstre silencieux, gardien de notre effroi,
Qui fit de notre orgueil son ultime tombeau.
Effrayant Corium, sombre et lente mémoire,
D'un pacte avec le feu, devenu don mortel,
Figé dans sa puissance, ironique victoire,
Dont le poison s'étend, invisible et cruel.Ainsi la créature est devenue la pierre,
Marquant notre futur d'un signal infernal,
Où l'homme, en déchaînant la fureur de la Terre,
A changé son œuvre en son propre mémorial.