PARTIE 5Citations de HERMAN HESSE
Il est certains lecteurs qui se bornent à une douzaine de livres pour toute leur vie et qui n 'en sont pas moins des lecteurs véritables. Il en est d'autres qui ont tout dévoré et peuvent dire leur mot sur tout, mais dont toute la peine la peine a été perdue. Car la culture suppose quelque chose à cultiver : un caractère, une personnalité. Là où il n'en existe pas, où la culture s'accomplit sans substance, comme dans le vide, le savoir peut se créer mais ni l'amour, ni la vie. Lecture sans amour, savoir sans révérence, culture sans le coeur, c'est là l'un des pires péchés contre l'esprit. (Textes sur la littérature ; vol I)
Mon expérience me dit que seules se laissent appeler et aiguiser les consciences qui sont déjà éveillées d'elles-mêmes. (Lettres choisies)
Le savoir n'a pas de pire ennemi que le désir de savoir, le fait d'apprendre. (Siddhartha)
Chacun doit faire un jour le pas qui le sépare de son père, de ses maîtres, chacun doit sentir la dureté de la solitude, bien que la plupart des gens ne puissent guère la supporter et rentrent bientôt dans le rang. (Demian)
La vérité est vécue, non enseignée en chaire. (Lettres inédites)
L'important, ce n'est pas la formation, la culture du maître, de même que l'intelligence et la connaissance de la pédagogie ne donnent pas à un père la capacité d’être un éducateur s'il n'a pas en tant qu'homme, en tant que modèle, cette force convaincante auquel un enfant croit plus qu'a des paroles. (Lettres inédites)
Je trouve beaucoup à redire sur notre école qui considère les hommes jusqu'à leur quatorzième, dix-huitième ou vingtième année, selon les cas, comme des êtres encore à un stade préliminaire, sans valeur propre. Je suis souvent surpris lorsque je lis dans des histoires ou dans des mémoires combien d'hommes ont tenu de grands emplois, réalisé des choses importantes, à un âge ou ils auraient encore de nos jours quatre examens à passer avant d'être adultes. J'imagine alors avec consternation une époque plus prudente encore où l'on ne pourra être étudiant avant trente ans, fonctionnaire avant quarante. Le mariage aussi sera retardé autant que possible et les gens convenables ne pourront, plus encore qu'aujourd'hui, engendrer des enfants qu'à un âge où ils n'auront plus que des restes à donner à ces pauvres petits. (Lettres inédites)
Que tu sois professeur, savant ou musicien, respecte le sens, mais ne crois pas qu'on puisse l'enseigner. C'est en voulant enseigner le sens que les philosophes de l'histoire ont perverti la moitié de l'histoire mondiale. (Le jeu des perles de verres)
L'homme cultivé n'est que cultivé, nullement plus intelligent que le peuple. (Lettres choisies)
Nul homme ne peut voir ou comprendre chez un autre ce qu'il n'a pas lui-même vécu. (Lettres inédites)
Le savoir est action. Le savoir est chose vécue. Il ne s'arrête pas. Sa durée a un nom l'instant. (Considérations)
Au bout de tout savoir et de tout accroissement de notre savoir, il n'y a pas un point final, mais un point d'interrogation. Plus de savoir signifie plus d'interrogations posées et à chacune de celles-ci en succède encore davantage. (Lettres inédites)
Lorsque dans notre jeunesse nous voyons pour la première fois le monde qui s’éclaire d'une façon harmonieuse grâce à quelque système, qu'il soit personnel ou emprunté, par quelque nouveau point de vue, nous éprouvons une satisfaction d'ordre purement esthétique. Dans ce sentiment d'une harmonie satisfaite, les natures naïves croient entendre la voix de la vérité. Or précisément la vérité n'est jamais satisfaite, mais va toujours plus loin et éveille des faims nouvelles. (Proses posthumes)
Il faut faire attention à tout, car on peut tout interpréter. (Le jeu des perles de verres)
Ce que pense et dit notre raison n'est que chiure de mouche à coté de ce qui court, de ce que ruisselle la vie, de rapports, d'apparentements au-delà du seuil. (Lettres inédites)
Celui qui fait de la pensée l'essentiel peut aller loin dans cette voie, mais il a changé le sol ferme contre l'eau et il finira par se noyer. (Le loup des steppes)
Ce que vous dites de la raison et contre la raison est fort juste, mais je crois pourtant que la raison employée au bon endroit est une bonne chose. Et si l'on veut absolument mettre en oeuvre l'instinct et l'intuition dans des domaines de la vie où la raison est un bon guide, les choses tourneront presque toujours mal, et vice-versa. Mais il ne faut pas accorder à la raison des prérogatives universelles et la placer au même rang que l'esprit. (Lettres inédites)
Reconnaître les causes, c'est en cela que consiste la pensée et par-là seulement les sensations deviennent connaissances, ne sont pas perdues, mais acquièrent l'être et se mettent à rayonner. (Siddharta)
Il y a la voie qui mène dans ces régions, éclairées par la froide lumière du néon, du rationnel et des parfaites certitudes. Mais celui qui a traversé ces zones retrouve un pays, la chaleur, l'innocence, l'amour. On n'y atteint pas la fuite, mais en transcendant ces régions glacées ; puis on peut reprendre ce séjour, puis le retrouver encore. (Lettres inédites)
Je ne suis pas contre le fait d'approfondir et interpréter les choses, mais contre l’étouffement, le refoulement du comportement naïf par le comportement rationnel. (Lettres inédites)
Le sens de la vie est le thème principal de l'art et de la philosophie, mais non celui de la science, de sorte que la philosophie est bien plus proche de l'art que la science. (Proses et feuilletons posthumes)
Pour les souvenirs, les impressions des sens sont un terreau nourricier plus profond que les meilleurs systèmes ou modes de pensée. (Le jeu des perles de verres)